Par Érick Deschênes
Pour moi, il s’agit d’une tendance négative qui s’ajoute aux autres signaux de fumée apparus dans les dernières années pour que les artisans de cette étape cruciale dans le développement de nos joueurs de hockey élite se regardent sérieusement dans le miroir et concrétise des réformes. En plus de cette vague de départs vers la NCAA, au cours des derniers championnats du monde de hockey junior, le Canada n’est plus une puissance dominante, des pays misant sur des programmes de développement différents, comme les États-Unis, la Suède et la Finlande, titillent désormais l’unifolié aux plus hauts sommets.
Vous me direz que les équipes juniors canadiennes voient toujours plusieurs de leurs talents être sélectionnés par des équipes de la LNH année après année. Mais on constate depuis plusieurs années que les recruteurs du circuit Bettman se tournent de plus en plus vers les programmes universitaires américains (NCAA) pour dénicher les pépites qui feront vibrer leurs partisans dans quelques saisons.
Grâce à leur calendrier moins chargé que ceux des équipes juniors canadiennes (qui disputent une soixantaine de matchs uniquement en saison régulière), les équipes de la NCAA peuvent offrir à leurs joueurs davantage de séances au gym pour améliorer leurs habiletés physiques ainsi que davantage d’entraînements et de séances vidéos pour développer leur intelligence du jeu.
À une étape charnière dans leur développement, qu’est-ce qui est le plus important pour un hockeyeur qui a de bonnes chances d’évoluer dans le hockey professionnel? Évoluer pour une équipe qui vous offre un encadrement professionnel, mais qui vous fait vivre la même cadence de matchs effrénés et de voyages que dans la LNH, en profitant des périodes libres plus rares pour poursuivre ses études et s’entraîner au gym?
Ou porter les couleurs d’une formation qui vous offre également un encadrement professionnel, mais pour laquelle vous disputerez moins de matchs, vous donnant le temps de bâtir une musculature qui vous permettra déjà d’être affûté lorsque vous atteindrez les rangs professionnels? Pour moi, le choix est clair.
En plus, grâce aux changements intervenus dans les règles de la NCAA il y a quelques années, les programmes universitaires américains peuvent désormais offrir des véritables ponts d’or aux espoirs qu’ils veulent attirer dans leurs rangs grâce aux droits de commandite et d’image des athlètes, en plus de leurs bourses d’études.
Selon les indiscrétions dévoilées plus tôt en juillet, Gavin McKenna, le probable premier choix au total de l’encan 2026 de la LNH, a décidé de quitter les Tigers de Medicine Hat (WHL) pour joindre le programme de hockey en montée de Penn State où il touchera 700 000 dollars américains grâce aux droits de commandite et d’image des joueurs. Tout un contraste avec la modique allocation hebdomadaire de quelques dizaines de dollars octroyés par les équipes juniors canadiennes.
Quant aux autres joueurs qui sont passés au sud et qui n’ont pas le statut de Gavin McKenna ou Cayden Lindstrom, comme Justin Poirier du Drakkar de Baie-Comeau, s’ils ne toucheront pas un aussi grand pactole, ils améliorent leur sort financièrement tout en accédant à d’excellents programmes académiques tout en assouvisant leur passion sportive. Même dans l’élite, ce ne sont pas tous les joueurs qui se rendront dans la LNH et ces derniers doivent se préparer un plan B si le hockey professionnel ne fonctionne pas pour eux.
Quoi faire?
Alors qu’est-ce que les circuits juniors canadiens et les fédérations gérant le hockey amateur au Canada doivent tirer de leurs réflexions pour freiner l’exode de nos meilleurs talents aux États-Unis?
Ces organisations doivent d'abord éviter la surenchère financière. Même des équipes comme les Remparts de Québec, les Wildcats de Moncton ou les Mooseheads d’Halifax, si on ne pense qu’aux grandes franchises de la LHJMQ, ne pourront rivaliser nez à nez avec la puissance financière des programmes universitaires américains.
L’environnement et les stratégies de développement doivent donc être changés. Si la LHJMQ a notamment réduit il y a quelques années de quelques matchs son calendrier qui tournait dans les environs des 70 matchs par saison, c’est encore beaucoup trop pour des ligues de développement.
Pourquoi pas un calendrier d’une quarantaine ou d’une cinquantaine de matchs par saison qui donnerait davantage de temps aux joueurs pour s’entraîner et étudier? Certains diraient que le modèle économique actuel des équipes juniors majeures serait brisé.
Cependant, avec un calendrier réduit, les matchs ne seraient disputés que la fin de semaine, une période plus propice pour attirer le maximum de partisans.
Je pense qu’une réduction du nombre de matchs dans les circuits juniors nécessiterait également une réduction du nombre d’équipes. Actuellement, le talent est trop dilué. En plus de nuire au développement des joueurs qui gagneraient à toujours affronter les meilleurs en tout temps, cette situation représente une embûche supplémentaire au marketing des circuits juniors. Qui a envie de payer pour assister à des matchs où le suspense n’est pas à son maximum ou à des massacres en règle?
Avec des affiches alléchantes pendant toute la saison, les équipes juniors pourraient augmenter le prix de leurs billets et ainsi récupérer les pertes provoquées par la diminution du nombre de matchs en saison.
En réduisant le nombre d'équipes et de matchs, les circuits diminueraient de la même façon les heures et kilomètres passés dans les autobus pour se rendre aux matchs disputés à l'extérieur par ses franchises tout en récupérant des sous.
En résumé, le hockey junior majeur canadien doit sortir des sentiers battus et proposer des programmes de développement qui se démarquent. Le magasinage est plus facile que jamais et les joueurs de talent ont plusieurs options alléchantes.
En bref
Dans un autre ordre d’idées, quel beau pari fait par Kent Hughes avec la signature du centre montréalais Joe Veleno pour un an, au modique salaire de 900 000 $. Le seul joueur qui a pu jouer dans la LHJMQ à 15 ans avait un beau potentiel qu’il n’a pu transposer jusqu’à maintenant dans la LNH. Mais s’il connaît un déclic dans sa ville natale, Joe Veleno pourrait être une option intéressante pour piloter le deuxième trio du Tricolore ou minimalement pousser dans le dos de Kirby Dach, qui semble condamné à occuper cette chaise chez le Canadien au cours de la prochaine saison, faute de mieux. ¸
Si Veleno poursuit dans ses insuccès vécus chez les Red Wings de Detroit et les Blackhawks de Chicago, Hughes pourra l’envoyer dans les mineurs s’il n’est pas réclamé au ballotage et le centre sera un renfort intéressant pour le Rocket de Laval.
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Une autre tuile tombe sur la tête du CF Montréal. Selon le journaliste Paul Tenorio de The Athletic, Mathieu Choinière, ancien joueur étoile local du club montréalais, quitterait la Suisse pour joindre le Los Angeles FC, une puissance de la MLS. Rappelons que dans la controverse, Choinière avait été transféré l’an dernier par le CF Montréal au Grasshopper FC, l’un des gros clubs suisses.
Quand l’aventure européenne se termine pour un joueur du Québec et qu’il préfère joindre une autre équipe que le club de son coin natal, ça démontre à quel point le CF Montréal est désormais dans un véritable bourbier!
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Le DG d’estrade prendra une pause au cours des prochaines semaines afin de recharger ses batteries en vue de l’automne. Un repos qui me permettra de revenir en force pour chroniquer sur le fabuleux monde du sport, dont la prochaine saison du Canadien qui s’annonce emballante.
Profitez bien des prochaines semaines pour continuer de savourer les joies de l’été. À bientôt!
Cette chronique fait partie de notre section Opinions, qui favorise une pluralité d'idées. Elle reflète l'opinion de son auteur, pas celle du Journal de Lévis.