Si la situation pandémique impacte l’ensemble de la population, ses effets viennent s’ajouter aux problématiques que rencontraient déjà les personnes immigrantes dans leurs démarches d’intégration. Le Tremplin enregistre une forte hausse des demandes de service.
Trente nouvelles demandes chaque mois sont reçues par le centre pour personnes immigrantes et leurs familles, le Tremplin. «C’est énorme», constate le directeur général de l’organisme lévisien, Guillaume Boivin. L’an passé, le Tremplin avait plutôt reçu autour de 200 nouveaux dossiers en un an. En 2020, le nombre pourrait atteindre 360.
«On est 100 % opérationnel. Au mois de juillet, on a reçu un nouveau financement du ministère de l’Immigration qui nous a permis de déployer de nouveaux services et d’augmenter notre force d’intervention pour les services individuels, les accompagnements. C’est arrivé au bon moment», rassure Guillaume Boivin.
Trois ressources de plus ont été ajoutées cet été, les intervenants auprès des personnes immigrantes passant ainsi de deux à cinq personnes. Le Tremplin espère prochainement intégrer une sixième ressource à cette équipe.
«Sans ce soutien, ça serait difficile de répondre à la demande. Si la tendance se maintient, on ne pourra pas continuer», admet le directeur.
En plus de l’augmentation des demandes, le profil des personnes qui font appel aux services de l’organisme a changé. «Ce qu’on voit, c’est une évolution du profil de notre clientèle. Il y a une plus forte proportion de travailleurs étrangers temporaires.»
La vulnérabilité augmente
En raison des forts besoin en main-d’œuvre en Chaudière-Appalaches, le recrutement international est en très forte augmentation. Le Tremplin comptait 15 % de travailleurs temporaires dans ses bénéficiaires en 2018-2019, une proportion qui est désormais de 56 %. «Dans la région, pour un résident permanent admis en 2019, il y a eu 15 résidents temporaires admis», observe Guillaume Boivin.
Sans compter que la pandémie a changé beaucoup de choses pour les personnes immigrantes, note-t-il. «On constate une augmentation de la vulnérabilité. Nos activités sociales ont été annulées, alors qu’on sait qu’un nouvel arrivant pour bien vivre son processus d’intégration a besoin de briser son isolement. Se reconstruire un réseau, c’est une étape importante. Sans activités sociales, ça rend leur situation difficile.»
«Quand on parle d’intégration, on parle souvent d’emploi. On entend beaucoup parler de cet aspect de l’immigration, car il y a des besoins en main-d’œuvre à combler. Ce que je dis aux employeurs, c’est de ne pas sous-estimer l’autre aspect. Boulot-dodo, ça ne fonctionne pas. Une personne qui est isolée ne peut pas avoir une intégration réussie. L’isolement est souvent une cause d’échec dans le processus de l’intégration.»
Les personnes immigrantes vivent ce que toutes les autres vivent avec en plus le poids psychologique des défis de l’intégration, de l’adaptation et des démarches à entreprendre. La conséquence, c’est une augmentation de l’anxiété et de la détresse psychologique. D’autres facteurs, comme une hausse de la précarité financière, ajoutent aussi aux difficultés, voit l’organisme sur le terrain.
De nombreuses problématiques sont ainsi apparues : entreprises mises à l’arrêt laissant les travailleurs temporairement sans ressources jusqu’à ce que les programmes d’aide se soient adapter à leur réalité, fermeture des bureaux qui délivrent les permis, gel de l’avancement de certains dossiers qui étaient en cours de traitement, quarantaine imposée aux travailleurs à leur arrivée ou encore l’impossibilité pour les étudiants étrangers de commencer leur session. Des situations qui se sont révélées de véritables casse-têtes pour les travailleurs et les entreprises.