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Lettre ouverte - Les regroupements de maisons d’hébergement exigent la mise en place de formations pour dépister efficacement la violence conjugale

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Photo : Fa Barboza - Unsplash

29 sept. 2022 09:47

Gisèle, 29 ans, poignardée le 9 septembre, Viergemene, 42 ans, poignardée le 16 septembre, Synthia, 38 ans, et ses deux garçons assassinés le 26 septembre. Les maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence lancent un cri du cœur aux futurs premier ministre et ministres de la condition Féminine et de la Santé et des Services sociaux.

Note de la rédaction : Le Journal de Lévis n'endosse aucune opinion qui est partagée dans les lettres d'opinion ou ouvertes publiées dans notre section Opinions. Les opinions qui sont exprimées dans ce texte sont celles des autrices signataires.

Beaucoup a été fait depuis 3 ans, des budgets conséquents ont notamment été injectés dans les services d’aide communautaires, pour l’implantation de tribunaux spécialisés et de cellules de crise. Gisèle et Viergemene avaient pourtant fait tout ce que la société demande aux victimes de violence conjugale : demander de l’aide, quitter l’agresseur, déménager, etc. Leurs ex-conjoints étaient assujettis à des conditions strictes, mais l’analyse de leur dangerosité a d’évidence été défaillante. L’ex-conjoint de Synthia n’était pas connu des services de police mais, selon notre expérience, la décision d’enlever la vie dans un contexte de contrôle coercitif ne survient pas par hasard, il y a toujours des signes avant-coureurs.

«Il faut bien comprendre que dans chaque situation de violence conjugale, il y a des signes précurseurs et un modus operandi similaire de la part des conjoints violents. Une vision et compréhension même de la problématique est nécessaire afin de protéger réellement ces femmes. Une formation obligatoire et continue doit être offerte aux personnels afin que le concept de contrôle coercitif soit compris et évalué de la bonne façon», indique Manon Monastesse, directrice générale de la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF).

Synthia était une professionnelle d’un milieu aisé, elle avait certainement accès aux services de santé, ainsi que ses enfants. N’y avait-il pas autour d’eux des professionnels qui auraient pu déceler les risques? L’action 23 du Plan d’action gouvernemental en matière de violence conjugale 2018-2023 prévoit depuis 4 ans la formation des professionnels de 1e ligne sur le dépistage de la violence conjugale, une formation de 6h est disponible sur le web, non-obligatoire.

La Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle, la violence conjugale et Rebâtir la confiance dévoilée en juin dernier est muette à ce sujet. Aucune action ne vise la formation systématique du personnel de la santé (médecine familiale, périnatalité, urgences, etc.) et des services sociaux en cette matière. Comme cette stratégie se veut évolutive, nous demandons le suivi, l’évaluation et le renforcement des efforts visant à rendre les professionnels plus alertes et réactifs face aux signes de violence conjugale.

«Il est inutile de multiplier les cellules de crise si le personnel de 1e ligne n’est pas formé au dépistage, ce sont bien souvent eux qui sont à la base de toute première étape du déclenchement du mécanisme de gestion de crise, selon Annick Brazeau, présidente du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale. Il est impératif que le nouveau gouvernement poursuive l’implantation de ces actions de façon déterminée et efficace.»

Pour Sabrina Lemeltier, présidente de l’Alliance des maisons d’hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale, «les maisons d’hébergement sont disponibles pour faire plus que leur part dans la mise en œuvre des recommandations des experts, le MSSS doit de son coté prendre la situation à bras le corps : financer les maisons d’hébergement ne suffira pas à la tâche, le réseau de la santé doit outiller adéquatement son personnel de 1e ligne, et s’assurer du développement de leurs compétences dans le déploiement des centres de services intégrés avec le ministère de la Justice, en complémentarité des tribunaux spécialisés».

En cas de danger ou même de simple de questionnement, toute femme peut trouver du soutien auprès d’une maison d’aide et d’hébergement, avec ou sans séjour sur place.

Manon Monastesse
Directrice générale de la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF)

Annick Brazeau
Présidente du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale

Sabrina Lemeltier
Présidente de l’Alliance des maisons d‘hébergement pour femmes et enfants victimes de violence conjugale

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