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Lettre d’opinion – Lévisien et contre le troisième lien!

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CRÉDIT : MINISTÈRE DES TRANSPORTS DU QUÉBEC

26 mai 2021 10:54

La semaine dernière, la Coalition Avenir Québec (CAQ) annonçait, dans un énorme tohu-bohu médiatique, un projet pharaonique de plusieurs milliards de dollars. Si ce projet, avant la tombée de cette somme astronomique, faisait largement consensus au sein de la population régionale – et même provinciale –, il suscite désormais une vague de scepticisme. D’ailleurs, les défenseurs de ce projet semblent avoir de la difficulté à répondre à la batterie de critiques qui, depuis quelques jours, est soulevée par plusieurs citoyens, médias et partis politiques.

Décidément, les partisans du «troisième lien» devront rendre compte des enjeux et de la pertinence de cet ambitieux projet routier. Parmi les défis posés par ce tunnel (dans sa forme actuelle), on dénote deux enjeux qui, aux yeux d’un citoyen du XXIe siècle, peuvent laisser perplexe : l’empreinte environnementale et le coût exorbitant du souterrain.

Dans un premier temps, on voit le maire de la municipalité, Gilles Lehouillier, qui se bombe le torse en se donnant des lettres de noblesse et en vantant les bienfaits de cette infrastructure, notamment sur le transport en commun, la sécurité publique et les retombées économiques pour la région. Ce maire, en brandissant l’idée du transport en commun et du Réseau express de la Capitale (REC), a bien compris qu’il allait recueillir le support et l’acceptabilité sociale à l’endroit de ce projet qui projette de paver huit kilomètres de goudron sous le fleuve.

Malgré tout, on est plusieurs à ne pas être convaincu de la pertinence et de l’empreinte soi-disant verte de ce souterrain qui, selon toute vraisemblance, doit relier les deux centres-villes et déboucher à l’est de la municipalité, soit en plein milieu des terres agricoles. Contrairement à ce que veut nous faire croire l’administration actuelle, ce projet ne représente pas comme un pas «vert» l’avenir, mais plutôt un recul en regard de ce que projette la vision des générations futures sur le transport et la mobilité durable. Ainsi, il apparait comme une marche arrière par rapport à ce que ce magistrat veut bien nous faire croire, soit un «projet béton et d’avenir».

Dans ces circonstances, il apparait évident que ce souterrain se présente comme un partenariat avec les groupes d’entrepreneurs et d’investisseurs de la région. Impatients, ceux-ci attendent simplement la première pelletée de terre ou l’arrivée du tunnelier pour exercer une pression sur un sympathisant déjà gagné à l’étalement urbain. Nul besoin d’être devin pour savoir que la municipalité qui tarde à se munir d’une politique environnementale, qui repousse incessamment la mise en place de voies routières réservées, qui hésite à améliorer les réseaux cyclables et qui finalement, permet d’abattre des milliers d’arbres pour développer des quartiers résidentiels en largeur plutôt qu’en hauteur, anticipe de développer la sortie du futur tunnel avant même son inauguration.

En somme, le maire, en s’enorgueillissant de cette infrastructure goudronnée apparemment verte à ses yeux, trahit ses véritables intentions sur la tenue d’un tel projet servant à redessiner le paysage lévisien et à donner raison, une fois de plus, à l’automobiliste qui, dans cette région, règne en maître. Inversement à ce que soutient l’administration actuelle, l’ineptie de ce souterrain apparaît, au niveau environnemental, comme un recul qui, à moyen-long terme, provoquera de nouveaux défis aux amateurs de bulles mobiles. Somme toute, celui qui prétend l’inverse est bien enrôlé dans cette tartufferie politique !

Dans un second temps, le coût astronomique en laisse plusieurs dubitatifs. La somme avancée pour le projet était, jusqu’à la semaine dernière, demeurée inconnue. Or, lors du dévoilement, on apprenait – avant même de connaître les sommes déboursées par le gouvernement fédéral (environ 10 %) – que le «troisième lien» allait coûter entre six et sept milliards de dollars. Le prix, dans la sphère médiatique, s’est rapidement élevé à dix milliards.

En fait, le parti politique qui nous a annoncé le coût de ce projet ne sait pas véritablement combien le tunnel coûtera; d’ailleurs, le chef de la formation politique qui en a fait l’annonce ne semble même pas connaître le prix moyen d’un loyer à Montréal. On ne tombera pas dans une lapalissade trop souvent ennuyeuse concernant l’explosion du coût des infrastructures au Québec; il est évident que le projet débordera les coûts fixés. Cela dit, on peut se demander ce qui, pour la région, doit être repensé collectivement. La pandémie, on le sait, a mis en lumière d’énormes failles structurelles dans nos systèmes et nos infrastructures (routières, scolaires et hospitalières) qui, dans plusieurs localités, sont dans des états souvent lamentables.

Bref, il convient de terminer avec la question à trente-sous : que feriez-vous avec dix milliards pour repenser les infrastructures de votre région? Quel projet permettrait de regarder véritablement vers l’avant et de rendre compte des ambitions de votre ville?

Anthony Tremblay-Roy

Lévis

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