Afin de proposer une solution plus efficace à la récupération du lisier de porc et des eaux usées, l’entreprise lévisienne Solugen a développé un procédé qui permet de séparer les résidus nocifs de l’eau. Ainsi, l’entreprise prétend pouvoir en récupérer une eau propre qui pourra être réutilisée sur place.
Grâce à un procédé de séparation des éléments liquides et solides par centrifugation puis de distillation azéotropique, Solugen a réussi créer un système qui permet de récupérer un volume de 84 % des eaux usées. Cette eau peut ensuite servir à nettoyer la porcherie ou encore abreuver les porcs sans danger. Les 16 % de matières restantes peuvent être revalorisés sous la forme d’un engrais naturel, composé d’azote et de potassium liquides et de phosphore solide. Ainsi le procédé remédie au problème de l’industrie porcine, qui demande l’utilisation de grandes superficies de terre pour l’épandage du lisier. Le système peut être aménagé dans un bâtiment adjacent à la porcherie où il puisera directement dans la préfosse le lisier à traiter.
Solugen a élaboré de A à Z le processus qui sera implanté dans les fermes. «Nous avons développé notre propre centrifugeuse pour répondre à nos besoins. C’est une séparation solide-liquide qui est 100 % automatisée. Comparé à différentes séparations solide-liquide, la notre fonctionne 24h sur 24, il n’y a aucune opération humaine qui a besoin d’être faite pour démarrer ou surveiller le procédé», a expliqué le président de Solugen, André Beaulieu-Blanchette. Solugen assure que ses systèmes sont fabriqués pour durer au moins 30 ans et que l’entreprise se charge des opérations et de la maintenance des appareils.
Une avancée importante
Le procédé a surtout été développé par le père de M. Beaulieu-Blanchette, Daniel Blanchette. À l’époque, Daniel Blanchette travaillait dans le domaine de la pyrolyse et il cherchait à réduire la contamination des eaux usées pour réduire les coûts totaux du produit final. Il avait réussi à créer un procédé qui diminuait de 10 fois la contamination au début des années 2000, mais la plus grande avancée a été découverte par erreur.
«Mon père a voulu amener une technologie qui diminuerait la contamination des eaux. Les eaux étaient tellement contaminées qu’il en coutait plus de 100 $ du mètre cube pour les traiter. Il a voulu créer un procédé qui réduisait de 10 fois la contamination pour ensuite faire les traitements qui existaient à l’époque. En faisant son montage, mon père a fait une erreur de manipulation et puis, au lieu de descendre de 10 fois la contamination, il l’a réduit de 1 000 fois. Ça a passé de 100 $ du mètre cube à moins d’un dollar», a raconté André Beaulieu-Blanchette.
Grâce à cette diminution importante, l’eau qui devait à la base subir plus de traitements pouvait être rejetée tout en respectant les normes de l’environnement. Peu après, l’idée d’utiliser le système dans l’industrie porcine est venue de l’oncle d’André Beaulieu qui évoluait dans ce domaine. Aujourd’hui, l’utilisation de la technologie de Solugen pourrait permettre aux producteurs de porcs de presque quadrupler leur production sur une même superficie de terre, tout en réduisant les coûts de production.
Au cours des dernières années, André Beaulieu Blanchette et son père ont réussi à augmenter considérablement la quantité d’eau qui peut être traitée. Ainsi, entre 2014 et 2016, le volume est passé d’un litre à l’heure à près de 1 000 litres.
Des défis à relever
«Notre plus grand défi est aussi notre meilleur avantage. Il y a eu beaucoup de projets dans les 15 dernières années qui ont échoué. Ce qui fait que les producteurs ne croient plus aux systèmes de traitement de lisier qui vont arriver à leurs fins. Il y a un grand scepticisme, sauf que nous, nous avons réussi à prouver notre système à petite et grande échelle. Malgré tout, ces projets montrent qu’il y a un intérêt des producteurs à se moderniser et trouver une solution à la gestion du lisier», a conclut André Beaulieu-Blanchette, qui précise que le système de Solugen pourra s’appliquer à plusieurs autres domaines et qu’il suscite déjà de l’intérêt en Europe.