La naloxone est utilisée pour aider à résorber les effets mortels d’une surdose de drogues, alors que les bandelettes pour la détection du fentanyl servent à identifier les composantes des drogues utilisées par un consommateur. Comme plusieurs drogues sont parfois mélangées lorsqu’elles sont vendues, les bandelettes peuvent ainsi prévenir la consommation du fentanyl ou des benzodiazépines.
Ce projet pilote est accompagné d’une étude qui durera jusqu’en 2028 et qui vise à évaluer les effets de la distributrice sur la vie des utilisateurs de drogues. L’initiative a également pour but d’améliorer l’accès aux outils de prévention et d’intervention pour les clientèles vulnérables, tout en leur offrant un accès confidentiel, anonyme et continu à ces ressources.
«Ce n’est pas seulement une machine distributrice automatisée de naloxone et de bandelettes de détection du fentanyl, souligne Liliana Romero, médecin spécialiste en surdose et directrice de la santé publique en Chaudière-Appalaches. C’est un projet qui vise à mettre de l’avant l’accès, la continuité et l’approche globale. On vise la prise en charge de l’utilisateur de drogues et de les acheminer aux services psychosociaux, aux services de santé physique et aux services de santé mentale.»
La distributrice est placée à un endroit de l’hôpital qui n’expose pas ses utilisateurs, mais qui est facile à trouver. De ce fait, le CISSS-CA croit pouvoir aller desservir une clientèle désaffiliée du réseau de la santé et, par le fait même, plus à risque de complications liées à la consommation de drogues. Avec cette distributrice accessible 24 heures sur 24, des usagers craignant être jugés ou mal accueillis peuvent accéder à des produits essentiels pour une consommation sécuritaire sans peur.
Cibler la clientèle à risque
Pour avoir accès à la distributrice, les utilisateurs doivent scanner un jeton qui leur est donné et qui est valide pour une durée de 90 jours. Des jetons peuvent être remis aux proches de personnes qui consomment ou directement aux utilisateurs de drogues, mais ils sont d’abord identifiés par des infirmières de rue et des organismes communautaires qui connaissent la clientèle. Ceux-ci sont un pont qui permet d’emmener la clientèle à risque vers les bons services.
«Au-delà de l’accompagnement clinique sur le comportement de la consommation, c’est une porte d’entrée dans le réseau de la santé, qui peut être plus compliqué pour les gens qui ont des enjeux d’organisation ou qui n’ont pas leur carte de la RAMQ. On vient plutôt créer un lien de confiance auprès d’une clientèle désinstitutionnalisée, pour qu’elle entre dans le système», explique Julie Lambert, adjointe à la direction de la santé publique du CISSS de Chaudière-Appalaches.
D’ailleurs, la durée de vie de 90 jours des jetons vise à créer un lien avec les usagers et s’assurer qu’un suivi est fait auprès de ceux-ci. C’est le personnel infirmier de rue qui fait le suivi et c’est aussi lui qui enseigne le fonctionnement du matériel disponible dans la distributrice.
«Quand je remets des jetons ou que je parle de matériel en réduction des méfaits, je fais toujours aussi de l’enseignement approprié, mais quand on est chez nous, l’enseignement peut être bien loin, donc la trousse inclut les étapes d’administration. C’est important que les proches ou les partenaires de consommation administrent bien la naloxone», ajoute Amélie Tanguay, infirmière de rue.
Les distributrices ailleurs dans le monde
Des distributrices du genre existent déjà ailleurs dans le monde et elles ont des retombées positives sur les utilisateurs. À Cincinnati, l’utilisation d’une seule distributrice a permis d’éviter des surdoses chez 78 personnes au cours de sa première année d’utilisation. Aux endroits où les distributrices sont installées, on observe une réduction de 10 % des décès liés aux surdoses. De plus, l’approche globale associée à ces machines a permis une hausse notable des activités d’accompagnement menées par les organismes communautaires auprès des personnes vulnérables.