«Il faut avoir l’humilité de dire que quand on a commencé nos travaux, il y a trois ans, l’inflation n’était pas galopante comme aujourd’hui, le fait d’avoir un tunnel (initial) de 19,4 mètres était également une question technique importante […], la situation de la main-d’œuvre est un enjeu important aussi», a expliqué François Bonnardel.
Le projet actuel suivra essentiellement le même tracé que celui présenté l’année dernière, mais c’est plutôt sous la forme d’un bitube de 12 à 15 mètres de diamètre, comprenant quatre voies plutôt que six, que la construction sera réalisée. Ainsi, les deux voies prévues uniquement pour le transport en commun ont été écartées du projet et le MTQ prévoit mettre en place une gestion dynamique des voies aux périodes de pointes pour le transport en commun. Ajoutons que l’inauguration du tunnel Québec-Lévis a été repoussée d’une année, c’est-à-dire en 2032.
Le ministre des Transports croit que ce changement n’affectera pas l’efficacité du transport en commun et que cet enjeu est un point essentiel au projet. Il a également assuré que les coûts estimés à 6,5 G$ seront respectés.
«C’est un projet qui englobe moins de risques parce qu’on aura des tunneliers qui ont déjà été bâtis, moins de déblai et un gain de temps. On a été en mesure avec le bureau de projet de statuer sur un montant et on va s’assurer de le respecter», a-t-il soutenu.
Pour Geneviève Guilbault, ce projet permettra de rééquilibrer l’aménagement du territoire sur la Rive-Sud puisqu’un grand développement s’est effectué dans l’ouest près des ponts au fil des années au détriment de l’est.
Le projet du REC doit répondre aux besoins de tous et cette mise à jour va en ce sens, croit la vice-première ministre.
«C’est important de développer ce plan dans un souci de complémentarité et d’harmonie entre les composantes du REC pour que tout le monde y trouve véritablement son compte autant pour les personnes qui habitent dans les centres-villes, en banlieue, dans la grande agglomération de Québec et les villes en périphérie», a-t-elle exposé.
François Bonnardel s’est engagé à présenter une mise à jour annuelle du projet jusqu’au dépôt du dossier d’affaires prévu en 2025.
Des questions qui restent toujours à répondre
De son côté, le maire de Lévis, Gilles Lehouillier, s’est réjoui de cette nouvelle mouture. «On est en train de reprendre le retard historique dans nos infrastructures de transport. Il est temps qu’on le fasse et là, enfin, on est en train de rattraper ce retard», a-t-il affirmé en marge de la conférence de presse.
Quant à lui, le maire de Québec, Bruno Marchand, n’est toujours pas convaincu par le projet et s’inquiète de l’étalement urbain qu’une telle infrastructure pourrait engendrer. «Je reste à convaincre dans ce projet-là. La présentation d’aujourd’hui démontre à travers une infographie la vision du projet. […] Maintenant, on veut en savoir plus, on veut des réponses à nos questions», a-t-il exprimé.
Pour le premier citoyen lévisien, la députée de Bellechasse, Stéphanie Lachance, et le préfet de la MRC de Bellechasse, Yvon Dumont, l’étalement urbain n’est nullement un enjeu dans ce projet.
«La réalité que nous vivons dans Bellechasse est tout autre. Dans le sud comté, on a de gros enjeux de dévitalisation. C’est plutôt une opportunité de revitaliser», a partagé Mme Lachance.
«C’est un cheval de bataille qui ne tient pas la route. Dans la région de Québec ou de Lévis, les gens qui veulent vivre en région ne font pas d’étalement urbain, ils font le choix d’aller vivre en région pour profiter de l’air ambiant, de la nature et améliorer leur qualité de vie. On a le droit de vivre et d’attirer des citoyens qui vont nous aider à bâtir des municipalités et une région qui va se développer convenablement», a ajouté le préfet de la MRC de Bellechasse.
«On souhaite démontrer au maire de Québec qu’il n’y en aura pas d’étalement urbain. Il ne faut pas oublier que l’objectif du projet centre-ville à centre-ville, c’est de relier deux autoroutes existantes. Et le double objectif, c’est de créer une révolution dans le transport collectif», a soulevé le maire de Lévis.
Le conseiller municipal du district Saint-Étienne élu sous la bannière du parti Repensons Lévis, Serge Bonin, s’inquiète du sort du transport en commun dans la nouvelle mouture du projet et qu’une sortie pour le transport collectif au pôle Desjardins n’ait pas encore été annoncée.
«Il reste bien des questions à répondre. Étant donné que le projet a énormément changé, et qu’il continuera de changer, que nous en sommes rendus à des voies réservées partielles, je crains pour la qualité de l’offre du transport en commun, et pour les effets réels du tunnel sur la fluidité.»
Aux yeux de la Chambre de commerce de Lévis (CCL), cette mise à jour «ajustée et intégrée» répond «aux aspirations et aux défis» de la région, mais l’organisation lévisienne déplore que cette révision ait retardé le début des travaux.
«Il devient urgent de passer à l’action et nous sommes impatients que le gouvernement officialise le début des travaux», a déclaré Marie-Josée Morency, vice-présidente exécutive et directrice générale de la CCL.
Quant à elle, la coalition Non au troisième lien n’a pas changé son fusil d’épaule. Elle soutient que ce nouveau projet «démontre clairement l'improvisation du gouvernement» et qu’«il causera de l’étalement urbain et ajoutera de la congestion par demande induite, tout en nous éloignant collectivement de nos cibles de réduction de gaz à effet de serre».
«Le gouvernement change quatre trente sous pour une piastre. Les modifications au projet ne changent rien à sa nature profonde. D’autant plus qu’on réduit l’offre de transport en commun : faire des voies réservées seulement à certaines heures, c’est faire place au transport collectif quand ça ne dérange pas trop la circulation automobile», a argué Marc-André Viau, directeur des relations gouvernementales chez Équiterre et membre de la coalition Non au troisième lien.