Par Érick Deschênes
Avant son arrivée dans la MLS, l’Impact a pu ravir plusieurs championnats et était une équipe dominante. Depuis 2012, le CF a poursuivi sur cette lancée dans le plus grand circuit professionnel de soccer au Canada et aux États-Unis en se qualifiant à une finale de conférence (2016) et deux demi-finales de conférence (2015 et 2022) des séries de la MLS ainsi qu’en remportant à quelques reprises le Trophée des Voyageurs (championnat canadien), titre qui lui a permis de vivre à quelques reprises la frénésie de la Ligue des champions de la CONCACAF.
Cette saison, on est très loin de ces heures de gloire alors que tout ce que touche le CF Montréal semble se transformer en catastrophes. Après 21 matchs d’une saison de 34 parties, la troupe de la Métropole se retrouve au dernier échelon de la conférence Est de la MLS, avec une maigre récolte de 3 victoires, 5 nulles et 13 défaites, bonne pour 14 points.
Pour ajouter l’insulte à l’injure, le CF a réussi l’exploit de se faire éliminer en quart de finale du championnat canadien. Le Forge FC est une équipe bien entraînée et dominante dans la Première ligue canadienne. Mais il s’agit d’une ligue professionnelle d’un niveau inférieur à la MLS, attirant des joueurs qui n’ont pas réussi à s’établir au plus haut niveau.
Au cours des dernières années, le Forge s’est fait un malin plaisir de surprendre le CF Montréal lors de cette compétition. Une élimination contre un petit poucet une fois, c’est un accident de parcours. Lorsque le même incident survient dans une courte période au soccer, on parle plutôt de catastrophe industrielle.
Comme je l’expliquais dans une précédente chronique, la famille Saputo, propriétaire de l’Impact/CF Montréal depuis de nombreuses années, a décidé depuis quelques années d’implanter un système intégré pour l’opération de ses franchises sportives de soccer. Le navire amiral, c’est désormais le Bologne FC, un club italien lui appartenant et qui évolue dans la plus grande ligue professionnelle de soccer dans la Botte (Serie A).
Ainsi, les gros investissements sont consentis à Bologne. Équipe indépendante, mais une sorte de club-école du grand frère italien, le CF Montréal mise sur de jeunes talents. Ces joueurs progresseront ultimement pour joindre les rangs du Bologne FC. Sinon, ils servent au CF Montréal à réaliser des transferts juteux qui rapporteront des centaines de milliers de dollars au club montréalais, comme ce fut le cas dernièrement avec la vente de Nathan Saliba à Anderlecht (prestigieux club de première division en Belgique).
Toutefois, contrairement aux ligues de second ordre en Europe où évolue des clubs-écoles de prestigieuses organisations comme Chelsea FC ou Manchester City, le CF Montréal évolue en MLS, une ligue qui propose un niveau de jeu qui s’améliore d’année en année grâce à la décision de plusieurs clubs d’investir massivement pour recruter des talents. Même si plusieurs de ses étoiles sont venues aux États-Unis pour amorcer une préretraite sportive, l’Inter Miami est la preuve éclatante de ce phénomène, le club de la Floride alignant l’un des plus grands joueurs de notre époque, Lionel Messi.
J’en conviens, le CF Montréal n’a pas les moyens de délier les cordons de la bourse et effectuer des investissements pharaoniques comme l’Inter Miami ou les deux clubs de Los Angeles. Mais de miser sur des alignements formés en grande partie de jeunes joueurs prometteurs, mais inexpérimentés, est une formule vouée à l’échec.
Lors de ses années couronnées de succès, l’Impact/CF Montréal donnait sa chance à de jeunes talents, mais ils étaient entourés de vétérans qui faisaient la différence, tels Patrice Bernier, Nacho Piatti ou Didier Drogba. L’an dernier, c’est en grande partie parce qu’il pouvait compter sur un buteur d’expérience en Josef Martinez que l’équipe de Montréal a pu se qualifier pour les séries de la MLS.
Le CF Montréal aura beau changer ses responsables des relations avec les médias et les partisans ainsi que continuer d’avoir un entraîneur-chef différent chaque saison, les victoires, comme dans tout sport, s’achètent grâce aux joueurs qui se retrouvent sur le terrain. Au cours de sa saison 2025, le CF Montréal a démontré qu’il manquait trop de pièces sur cet échiquier, notamment un milieu offensif d’expérience pouvant alimenter efficacement les buteurs.
Je le craignais dans un précédent texte, le CF Montréal laisse désormais indifférent, dans le meilleur des cas, les amateurs de sport du Québec. Le commun des mortels ne suit même plus les activités du club et les «ultras» partisans de l’équipe affirment haut et fort qu’ils ne renouvelleront pas leur abonnement de saison l’an prochain.
Comme avec les Expos au tournant des années 2000, il serait d’une tristesse de voir Montréal perdre son club de soccer professionnel, alors que ce sport demeure la discipline la plus pratiquée au monde et qu’il est de plus en plus populaire au Québec. J’ai eu la chance d’aller deux fois au Stade Saputo. Des expériences qui m’ont marqué, que ce soit pour l’ambiance dans le stade ou le spectacle offert sur le terrain. En 2025, on est désormais loin de ces réussites.
L’organisation montréalaise est dans son droit de miser sur les jeunes. Mais elle peut développer de jeunes talents tout en alignant des vétérans qui permettront à son équipe première de ne pas croupir dans les bas fonds de la MLS. Dans le sport, c’est les résultats qui permettent de nourrir l’intérêt des amateurs, pas les simples promesses!