jeudi 13 novembre 2025
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Progressisme : l’autodiagnostic flatteur d’une élite malade

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11 nov. 2025 06:45

Les élections municipales viennent à peine de se terminer, et déjà le discours du «renouveau» envahit l’espace public. On nous l’avait promis il y a quatre ans, et voilà qu’on nous le ressert, souvent par les mêmes visages, comme un disque qui saute :

Par Renaud Labrecque

«Une autre façon de faire de la politique.» 
«Nous sommes le progrès.» 
«Nous sommes différents.» 

Pourtant, quand on regarde de près, beaucoup de ces élus de la «nouvelle vague» sont exactement ce qu’ils prétendaient dénoncer. Ils ont les mêmes réflexes, les mêmes méthodes, et ils ont ajouté la victimisation. Oui, ils ont changé leurs affiches, mais pas leur mentalité. Pendant qu’ils parlent de transformation et de décarbonation, l’essentiel s’effrite. Plutôt que d’entretenir ce qui existe, on préfère inaugurer du neuf. Parce que le neuf se photographie bien. Il impressionne. L’illusion du progrès municipal, c’est de construire au lieu d’entretenir. Trop souvent, les municipalités privilégient les inaugurations et les conférences de presse plutôt que la gestion réelle. On promet des quartiers «verts», des pavillons «durables», des projets «innovants».
 
Mais derrière ces vitrines, les infrastructures en place sont négligées. Les routes s’usent, les réseaux frôlent la rupture, et le citoyen attentif comprend que le progrès ne passe pas par les photos, mais par l’entretien au quotidien. Entretenir, ça ne se voit pas. Réparer, ça ne se vante pas. Et pourtant, c’est là que se joue la vraie responsabilité municipale. Résultat : on construit du neuf sur du vieux non entretenu, puis on accuse les générations précédentes d’avoir mal planifié, tout en reproduisant les mêmes erreurs. 
Le mot «progressiste» est devenu une maladie. Une étiquette morale que certains s’attribuent pour éviter la critique. Parce qu’au fond, qui oserait critiquer le progrès? Le «nous sommes progressistes» est devenu l’équivalent du «c’est moi qui décide» d’antan. On parle d’ouverture, mais on agit en vase clos. On prêche la transparence, mais on évite les questions. On se dit inclusif, mais on écarte l’opposition. Qu’ils sont beaux, les progressistes…

 

S’auto-proclamer progressiste ne rend personne progressiste. Ce n’est pas une posture qu’on s’attribue, c’est quelque chose qu’on démontre.  Trop souvent, ceux qui se disent modernes et ouverts se révèlent fermés à la critique, obsédés par l’image et allergiques à la contradiction. Ils ne progressent pas : ils s’auto-progressisent, convaincus d’avoir raison simplement parce qu’ils se croient différents. N’oubliez pas : ils n’ont jamais tort, et ce n’est jamais de leur faute. Ils font «confiance» … quelle manipulation malsaine! 

Le vrai progrès municipal n’a pourtant rien de spectaculaire. Il réside dans la planification, la rigueur et la maintenance. Dans le courage d’entretenir plutôt que d’inaugurer. Chaque dollar investi dans l’entretien aujourd’hui est un gain pour demain. Chaque route réparée, chaque pont sécurisé, chaque conduite entretenue est un acte concret de progrès. Mais ce type de progrès ne rapporte rien politiquement. Pas de ruban à couper, pas de manchette flatteuse prémâchée par certains journalistes. Alors on le délaisse au profit de projets politisés, d’annonces sur fond vert et de concepts creux de «ville intelligente» ou de «virage durable». En passant : rien n’est plus durable pour l’environnement que d’entretenir.

 

La réussite municipale ne se mesure pas au nombre de projets lancés, mais à la qualité de ce qui continue de fonctionner. L’indifférence des citoyens envers leurs élus et fonctionnaires, voilà le vrai trophée. C'est la preuve que la ville fonctionne comme elle le devrait. Mais ce modèle ne plaît pas aux égos. La nouvelle vague d’élus veut laisser sa trace : un parc, un bâtiment, une initiative culturelle signée de leur nom. Le culte de la trace personnelle, frôlant parfois le religieux, a remplacé le sentiment d’appartenance collectif. Pourtant, la prospérité, la sécurité et la stabilité de nos villes reposent déjà sur des bases solides. Le véritable progrès municipal ne consiste pas à multiplier les projets, mais à entretenir ce que nous avons. C’est ainsi que le sentiment d’appartenance s’améliore réellement. 

 

Consolider nos acquis n’est pas une faiblesse : c’est la preuve d’une maturité politique et administrative. Une route entretenue vaut mieux qu’un boulevard flambant neuf. Un aqueduc fiable vaut mieux qu’un centre de curling. Il est temps de cesser d’associer nouveauté et progrès. De comprendre qu’un changement de cuisine n’équivaut pas à un changement de fondation. 

 

Le progrès réel se mesure dans l’écoute, la rigueur et l’humilité. Les nouveaux élus et fonctionnaires ont maintenant quatre ans pour prouver qu’ils ne sont pas simplement des clones polis d’un système qu’ils prétendaient dénoncer. 
Quatre ans pour comprendre que le progrès ne se décrète pas : il s’entretient, il se planifie, il se mérite. Sinon, à force de s’autoproclamer porteurs du changement, ils deviendront exactement ce qu’ils prétendaient combattre : des élus déconnectés, convaincus d’avoir raison, incapables de voir qu’ils sont le problème. 

 

Alors, la prochaine fois que vous serez en voiture ou à pied, prenez une minute. Regardez autour de vous : routes, ponts, réseaux électriques et souterrains… Ces infrastructures forment la colonne vertébrale de notre économie. Sans elles, l’économie québécoise s’effondrerait en quelques mois à peine. 

 

Pour terminer, la culture de la nouveauté au détriment de la consolidation de nos acquis ne touche pas seulement nos relations sociales ; elle mine maintenant la gestion municipale. 

 

Consolider nos acquis : voilà où réside la vraie richesse du monde municipal.

 

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