mercredi 19 février 2025
Votre Journal. Votre allié local.

Histoire et patrimoine > On se souvient

Chronique historique

La deuxième démolition de l’ancien hôtel Victoria

Les + lus

L’hôtel Victoria au 19e siècle. – Photo : Archives Ville de Lévis

04 févr. 2025 08:57

La démolition de l’ancien hôtel Victoria en 2024 a fait couler beaucoup d’encre et généré des clics. Mais force est d’admettre que les heures de gloire de l’endroit ne dataient pas d’hier sans compter qu’il y eut une première démolition entre temps.

Par Claude Genest

Lévis a la chance d’avoir un mémorialiste qui a consigné énormément de détails sur l’histoire de notre ville. Il s’agit de Pierre-Georges Roy, dont la production historique est riche et variée. Je pense ici à ses séries des Dates Lévisiennes, des Glanures Lévisiennes et ses Profils Lévisiens qui contiennent une foule de détails sur le passé de la ville.

C’est en feuilletant au hasard la deuxième série des Profils Lévisiens, publiée en 1948, que mon regard s’est posé sur une courte biographie de Frank Tofield, premier gestionnaire de l’ancien hôtel Victoria. La particularité de ce texte est qu’il nous permet de comprendre à la fois ce qui a fait la renommée de l’hôtel à partir du milieu des années 1860, mais aussi les causes de son essoufflement.

Pour Roy, le succès de l’hôtel au XIXe siècle tient à la fois de sa proximité du chemin de fer, mais aussi de l’absence d’un lien constant vers la ville de Québec, destination finale de la majorité des voyageurs. Roy nous raconte que le «Grand-Tronc était alors le seul chemin de fer qui conduisait à Québec, de l’ouest ou de l’est. Ceci est une façon de parler, car le Grand-Tronc n’entrait pas dans Québec. Les voyageurs qui arrivaient de nuit à Lévis étaient obligés d’attendre au lendemain pour traverser le fleuve», d’où la popularité de l’endroit.

Selon les souvenirs de Roy, ce sont successivement Frank Tofield, suivi de sa veuve Jane Wesnidge et plus tard de son fils William Tofield qui dirige l’hôtel avec succès. Parmi les clients réguliers, on retrouve sir John A. Macdonald «et tous les hommes politiques qui venaient assister aux sessions du Parlement» à l’époque du Canada Uni où plus tard de la province, mais aussi l’ancien président américain William Howard Taft, comme mentionné dans ma chronique du 1er mars 2022. Bref, un hôtel aux dires de Roy qui à son apogée est l’un «des plus achalandés et des plus renommés de la région de Québec».

Cette période faste de l’hôtel se termine «aux environs de 1890». L’hôtel fut impacté par le déplacement des installations ferroviaires plus proches de la traverse et aussi des traversées du fleuve plus fréquentes qui achevèrent «de lui enlever ses derniers clients», nous raconte Roy. Il est ensuite «démoli section par section et la partie ouest, seule reste débout pour affirmer qu’il existe encore», ajoute Roy en 1948. C’est cette ancienne section ouest qui a disparu l’an dernier sous le pic des démolisseurs.

En résumé, au moment de la démolition finale en 2024, il s’agit dans les faits des restes d’un ancien hôtel qui avait connu son apogée il y a fort longtemps, mais pour lequel des Lévisiens conservaient à raison des souvenirs de sa gloire passée et de son architecture particulière. C’est une louable nostalgie qui s’est envolée en poussière.

Les + lus