vendredi 20 juin 2025
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Beaumont

Des groupes régionaux et nationaux se mobilisent pour sauver le patrimoine bâti

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Gaston Cadrin, Michael Jacques, Jean-Louis Vallée et Sylvie Corriveau devant le nouveau bâtiment à logements à Beaumont. – Photo : Étienne Vallières

18 juin 2025 05:32

Les Amis et propriétaires de maisons anciennes du Québec (APMAQ), la Fédération Histoire Québec (FHQ), le Groupe d’initiatives de recherche appliquées au milieu (GIRAM) et la Société historique de Bellechasse (SHB) ont mis en lumière la gestion préoccupante du patrimoine bâti dans les régions du Québec lors d’une conférence de presse, le 11 juin.

Les représentants régionaux ont tenu leur conférence de presse entre la maison Turgeon et un bâtiment à logements en construction dans le but de conscientiser à la «menace grandissante qui pèse sur le patrimoine bâti partout au Québec». Ils mettent l’accent sur une hausse marquée des demandes de démolition d’édifices anciens au profit de nouvelles constructions.

«Nous sommes en train de démolir l’exceptionnel pour construire le répétitif. Nous sacrifions l’identité au profit de la conformité. Et ce faisant, nous amputons nos communautés de leur mémoire vivante. Le patrimoine bâti n’est pas une affaire de murs anciens, il est un outil puissant d’enracinement, de transmission et même d’intégration», a lancé Jean-Louis Vallée, président de la FHQ.

Pour expliquer la hausse des demandes de démolition, Jean-Louis Vallée rappelle que les municipalités régionales de comté (MRC) ont jusqu’au 1er avril 2026 pour adopter officiellement leurs inventaires de bâtiments d’intérêt patrimonial, tel que le prévoit la Loi sur le patrimoine culturel.

«Pourquoi cette date provoque-t-elle autant d’effervescence dans les bureaux municipaux, demande-t-il? Parce que certaines municipalités semblent avoir compris que, tant que les inventaires ne sont pas adoptés, elles peuvent encore émettre des permis de démolition, parfois à contrecœur, souvent sans débat public, même lorsque les édifices visés présentent un intérêt historique manifeste.»

De son côté, Gaston Cadrin, vice-président au patrimoine du GIRAM, est inquiet que la Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière d’habitation, adoptée en 2024, ait un impact négatif sur la conservation des bâtiments patrimoniaux.

«On a établi un article 93 dans la loi 31 pour permettre des dérogations au niveau urbanistique, explique-t-il. Donc un promoteur qui achète un terrain pour y construire un immeuble de plus de trois logements n’a pas à se plier aux plans d’urbanisme qui ont été faits. La municipalité pourrait empêcher ça, mais les élus municipaux sont très heureux de voir les taxes entrer et c’est comme ça qu’on détruit nos milieux patrimoniaux ou nos municipalités qui ont un cachet touristique et patrimonial particulier.»

L’importance du patrimoine bâti

Si plusieurs groupes se sont présentés pour défendre le patrimoine bâti, c’est qu’ils considèrent que celui-ci est important pour la conservation de la culture québécoise. Jean-Louis Vallée mentionne d’ailleurs que ce patrimoine serait une bonne manière d’intégrer les nouveaux arrivants en leur enseignant son importance historique.

De son côté, Michael Jacques, directeur général des APMAQ, dénonce la gestion à deux vitesses des enjeux culturels de la province.

«Au Québec, si on voit un mot en anglais écrit un peu trop gros à quelque part, vous allez en entendre parler dans les journaux et à l’Assemblée nationale. Pourtant, si on cache un bâtiment qui parle de notre identité, comme la Maison Turgeon, ou même si on en démolit un qui n’est pas assez rare ou reconnu, ça passe dans les égouts. Pourtant, les maisons patrimoniales sont un vecteur de l’identité québécoise. En regardant comment une maison ancienne est bâtie, on reconnaît nos histoires et nos particularités régionales, on reconnaît ce qui fait du Québec un endroit différent, un endroit reconnaissable, ici comme ailleurs. Ce qui arrive quand on construit des blocs de logements qui sont tous pareils, c’est qu’on ne peut plus se reconnaître», souligne Michael Jacques.

Pour Sylvie Corriveau, vice-présidente de la SHB, c’est le patrimoine qui fait de Beaumont un endroit spécial.

«Beaumont doit conserver et protéger son patrimoine pour le présent et pour le futur. C’est la plus belle carte de visite qu’une municipalité puisse s’offrir pour se singulariser. La densification urbaine et le revenu de taxation, bien qu’ils soient un apport économique important pour les municipalités, ne doivent jamais être privilégiés au détriment de la valeur inestimable du patrimoine du Québec», mentionne Sylvie Corriveau.

Elle a d’ailleurs lancé une invitation aux prochains élus municipaux qui porteront le mandat de protéger le patrimoine bâti.

«On aura bientôt de nouveaux conseillers municipaux et de nouveaux maires. Ils auront la possibilité d’avoir une formation par le ministère des Affaires municipales. Pourquoi est-ce qu’on ne demanderait au ministère de la Culture de leur donner une formation en protection du patrimoine?», lance Sylvie Corriveau.

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