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Fête des oiseaux

Regard sur une importante fête pour le patrimoine, 50 ans plus tard

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Image de la parade de l’édition de 1975 de la Fête des oiseaux, que l’on pouvait voir dans les journaux de Lévis de l’époque. - Photo : Courtoisie

06 mai 2025 05:33

Le 4 mai 1975, un groupe de Lévisiens engagés a concrétisé sa volonté de s’exprimer sur un enjeu bien important pour eux : la protection de l’ancienne église anglicane, la Holy Trinity, située au 31, rue Wolfe, et qui abrite désormais L’Anglicane. C’est à ce moment qu’est née la Fête des oiseaux. 50 ans plus tard, le Journal s’est entretenu avec des artisans de cette fête, qui ont tenu des retrouvailles le 4 mai dernier.

Ces bâtiments maintenant connus sous les noms de L’Anglicane et du Centre d’exposition Louise-Carrier, tous deux gérés par Espace DCL, n’ont pas toujours eu un avenir aussi certain.

Alors que l’église Holy Trinity avait été achetée par la Ville de Lévis en 1973, les rumeurs courraient que la volonté n’était pas de les transformer en  lieux culturels. Dans les idées diffusées à ce moment, la construction de logements à prix modique nécessitant la démolition de l’ancienne église faisait partie du nouvel usage désiré pour le site.

Deux ans plus tard, alors que rien n’avait encore bougé à ce sujet, des artisans de la Fête des oiseaux se sont regroupés et ont décidé de créer cet événement dans le but de faire entendre leurs revendications et volontés aux élus ainsi qu’à la population lévisienne.

«Les objectifs étaient d’éviter qu’un promoteur vienne mettre le pic dans le bâtiment et que les citoyens puissent reprendre le parc, qui anciennement était le cimetière», énonce Pierre Mercure qui était impliqué dans la parade de la première Fête des oiseaux ainsi que dans le comité organisateur des retrouvailles du 4 mai dernier.

Parmi les instigateurs, on compte notamment Richard Théberge et Marie-Lucie Gosselin, en plus de l’implication de la journaliste Sylvie Ruel, dans la diffusion des communications de l’événement, et d’Antoine Dubé, ancien député bloquiste de Lévis à la Chambre des communes de 1993 à 2003, qui, à l’époque des débuts de la Fête des oiseaux, était animateur au service des loisirs de la Ville de Lévis.

Pour les artisans de la Fête des oiseaux, le but était clair et l’est encore aujourd’hui. «Nous voulions sensibiliser la population et les élus à garder cette bâtisse-là, parce qu’elle aurait normalement passé au pic. Si la Fête des oiseaux n’avait pas été là, il n’y aurait pas d’Anglicane et pas de Centre d’exposition Louise-Carrier aujourd’hui», souligne Réjean Bernard, président du conseil d’administration de la Fête des oiseaux de 1979 à 1980 ainsi que le premier directeur général de la Corporation du centre d’art de Lévis, qui est devenue L’Anglicane.

Tenue le 4 mai 1975, la première Fête des oiseaux consistait en une parade ainsi qu’en une série de prestations artistiques diverses. Celle-ci a obtenu une médiatisation importante de son événement et de sa cause. Le maire de Lévis de l’époque, Vincent-F. Chagnon, présent lors de la deuxième édition en 1976, s’est à ce moment engagé à conserver l’ancienne église pour en faire un lieu culturel.

La Fête des oiseaux s’est ensuite poursuivie jusqu’en 1985, année signant les dernières festivités comme le site de L’Anglicane n’était plus à sauver. À l’exception des années 1975 et 1982, la fête avait lieu sur plusieurs jours mettant de l’avant, toujours de manière bénévole, des artistes de toutes disciplines confondues et offrant des activités familiales pour tous.

Un travail avec la Ville

La Fête des oiseaux était organisée et planifiée par les jeunes lévisiens dans une période où le contexte favorisait l’implication et l’engagement citoyen, notamment avec la montée du Parti québécois, le premier mandat comme premier ministre du Québec de son chef, René Lévesque, et la fin de la période hippie.

«Il y avait une vision bien précise [chez les gens impliqués], c’est-à-dire le développement du centre d’art, le développement du Vieux-Lévis, la protection des espaces verts et la protection du patrimoine bâti. Tout ça, c’étaient des messages qui disaient voici, nous autres les jeunes, ce qui est important pour nous», se rappelle Réjean Bernard.

C’est vers la fin de l’année 1978 et le début de 1979 que la Corporation du centre d’art a été incorporée afin de concrétiser le projet de transformation de l’ancien temple anglican.

La Fête des oiseaux travaillait de concert avec celle-ci et avec la Ville, ayant toujours pour but la sauvegarde de la bâtisse et pour s’assurer que le projet serait mené à bon port. Toutefois, lors de la première assemblée générale de la corporation visant à nommer le conseil d’administration de celle-ci, un conflit a failli menacer le travail réalisé par les deux groupes.

«On s’est aperçu qu’on s’est fait avoir. Parallèlement, les gens du comité de la corporation avaient fait une cabale, sans que les jeunes aient été informés. Quand on s’est présenté à l’assemblée générale, dans la salle, il y avait 300 personnes et il y en avait 280 que nous n’avions jamais vu. Il y avait des cartes de membres qui avaient été vendues en cachette afin d’élire le conseil d’administration (CA) de la corporation», raconte Réjean Bernard.

Ce dernier, qui a été nommé directeur de la corporation en 1980, explique avoir vécu des années difficiles avec ce CA qui ne partageait pas les mêmes idées. Ce conflit, présentant un choc entre ces deux générations, soit les plus jeunes notamment impliqués avec la Fête des oiseaux, surnommés les barbus, et les cravates, les gens un peu plus vieux dans cette administration de la corporation et de la Ville, a marqué l’histoire de la Fête des oiseaux durant une période d’environ deux ans.

Après deux années plus difficiles, des changements au CA de la corporation ont permis une meilleure entente. La Fête des oiseaux est repartie en force pour ses trois dernières éditions avant de prendre fin en 1985. Cette époque charnière dans la vie culturelle lévisienne a mené au 4 mai dernier, avec les retrouvailles des artisans de cette fête au bar lévisien la Taverne la Barricade.

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